Les Penny Toys

 par Pasky (journaliste àALADIN et ANTIQUE TOY WORLD

On les appelait « jouets de bazar » ou « jouets de quat’ sous » en France, « Groschenspielzeug » en Allemagne, « Penny toys » ailleurs. Assemblés parfois avec des métaux de récupération, reconnaissables quelquefois à l’intérieur par les impressions qu’ils portent, ils ont gardé un charme particulier, reflet de l’industrie inventive et prospère du jouet de métal des années 1900

Les penny toys étaient des jouets de bazar. Bon marché, ils étaient accessibles au plus grand nombre notamment les familles de la classe ouvrière. Dans ce sens, l'avènement des penny toys a incontestablement élargi le marché des jouets pour enfants. L’histoire des penny toys est liée à l’évolution de l’industrie française du soldat de plomb.  Les fabricants, souhaitant conquérir un nouveau public que celui des amateurs d’histoire militaire, eurent l’idée de diversifier leur production. C’est ainsi qu’ils produisirent des petits sujets à accrocher au sapin pour les fêtes de Noël ainsi que des accessoires pour les maisons de poupées.   Hormis leur coût très faible, les penny toys offraient un intérêt majeur car, représentant presque toutes les activités humaines, ils pouvaient être déclinés en une variété quasi infinie de thèmes. Ainsi trouvait-on le plus souvent des représentations de moyens de locomotion mais aussi des métiers, des personnages, des objets du quotidien, des tirelires ou encore des animaux. Une petite partie d’entre eux était pourvue d’un mécanisme, parfois sophistiqué.

 Il existait également des penny toys sous forme de sifflets surmontés parfois d’un jouet animé, la pièce faisait, à ce moment-là, doublement office de jouet...  

 Où pouvait-on les acheter ? 

Ces petits jouets étaient fabriqués par de très nombreuses entreprises qui vendaient leur production à des grossistes (Nuremberg en Allemagne par exemple), dans les boutiques, les galeries marchandes ou directement sur les trottoirs. On pouvait les trouver en boîte mais la plupart du temps ils étaient vendus en vrac à des camelots qui les revendaient à leur tour sur les foires et les marchés ou à l’occasion de fêtes.  


 

L’âge d’or des penny toys entre 1895 et 1914

Très colorés, les penny toys ont été réalisés en papier, en plâtre, en bois, en plomb et en fer-blanc. Jusqu’aux années 1950, certains étaient même fabriqués en Celluloïd (marque S.I.C.) mais en quantité moindre que le plomb et la tôle. Ils étaient peints à la main avant d’être emboutis ou fabriqués en tôle lithographiée. Parmi les techniques de décoration qui étaient utilisées, le vernis était très prisé et était appliqué soit sur la pièce à « brut » (plomb, étain) soit sur le jouet déjà peint. Le « vernis à l’alcool », utilisé avant 1900, permettait d’obtenir des couleurs très brillantes et a survécu sur de nombreuses pièces à l’usure du temps. Bien qu’ils représentent les plus anciens penny toys ces jouets vernis à l’alcool ont gardé une fraîcheur incomparable, témoins les scarabées et papillons de Einfalt.

Les jouets de bazar français étaient produits dans de petites entreprises, souvent familiales, établies pour la plupart à Paris, où l’industrie du recyclage de la tôle était très active. En Allemagne cette industrie était concentré sur la ville de Nuremberg.Très en vogue dès 1895, ils alimentaient à moindre frais les catalogues des grossistes en bimbeloterie, les étals des camelots et autres petits métiers de colportage présents sur les boulevards de la capitale. Les couleurs de ces modèles d’avant la première guerre mondiale sont plus riches et présentent plus de détails embossés. Leur fabrication continua cependant jusque dans les années 1930 et même au-delà. Ainsi, certains penny toys ont été produits tardivement (années 1950 et même 1970) comme chez Polichinelle ou C.R. deux marques françaises. Mais dans ces dernières années, la qualité et le savoir-faire s’étaient quelque peu perdus. Dès le lancement des premiers spécimens, les fabricants ont rivalisé de créativité pour créer des jouets « en mouvement ». Certains penny toys possédaient des éléments mobiles et étaient dotés parfois d’un mécanisme qui les faisait bouger en exécutant des mouvements simples (manivelle, tige à crémaillère, mécanisme à tirette, contrepoids en plomb). Les véhicules pouvaient avancer grâce à la présence d’un volant à inertie ou d’un mécanisme à ressort à remonter avec une clé. 

Aussi, apparaissent-ils aujourd’hui comme des jouets sophistiqués malgré leur petite taille. En effet, ils ne mesuraient habituellement pas plus de 10 cm en tout (souvent moins).

Enfin, les penny toys cachaient souvent un bonbon sous une trappe, un couvercle ou un petit coffret spécialement conçu pour accueillir la friandise. Ce petit bonus ajoutait encore à l’engouement et au charme de ces jouets miniatures. 

Quat’sous d’ingéniosité

Dès le lancement des premiers spécimens, les fabricants ont rivalisé d’ingéniosité pour créer des jouets « en mouvement ». Certains penny toys possédaient des éléments mobiles et étaient dotés parfois d’un mécanisme qui les faisait bouger en exécutant des mouvements simples (manivelle, tige à crémaillère, mécanisme à tirette). Les véhicules pouvaient avancer grâce à la présence d’un volant à inertie en plomb ou d’un mécanisme à ressort à remonter avec une clé.   Aussi, apparaissent-ils aujourd’hui comme des jouets sophistiqués malgré leur petite taille. En effet, ils ne mesuraient habituellement pas plus de dix centimètres en tout, souvent moins. Enfin, les penny toys cachaient souvent un bonbon sous une trappe, un couvercle ou un petit coffret spécialement conçu pour accueillir la friandise. Ce petit bonus ajoutait encore à l’engouement et au charme de ces jouets miniatures. 

 Comment fabriquait-on les Penny Toys ?

 Le manuel du fabricant de jouets paru en 1922 nous renseigne à propos de la création d’un jouet de la maison Charles-Jacques Rossignol, fondé en 1868 (C.R.) :

La technique de sa fabrication consiste à établir un dessin d’ensemble, puis un autre de chacune des pièces qui formeront l’objet en tenant bien compte des formes bombées ou en retrait. Ces dessins ont en effet une très grande importance car ils facilitent le travail de l’imprimeur sur métal. Lorsque le fer blanc a reçu l’impression, il devra être découpé en bandes longitudinales qui seront soumises à une machine à découper et à ajourer, laquelle détourera le dessin, ouvrira portes et fenêtres, les boutonnières d’agrafes. Une troisième machine devra estamper ensuite certains motifs, tandis qu’une autre devra donner leur forme aux parties courbes. Les roues devront être ajourées et percées, puis embouties et garnies d’un moyeu en plomb coulé directement dessus. Enfin, les roues devront être assemblées par un fil de fer dressé et coupé à la longueur voulue. L’assemblage des agrafes qui sont indispensables à la réunion des pièces se fait au moyen de machines spécialisées.

Les principaux fabricants 

En France, l’un des plus célèbres fabricants fut Charles-Jacques Rossignol qui débuta sa production de jouets de bazar dès 1875 et ne cessera d’en produire qu’en 1962, à la fermeture de l’usine. La marque C.R. se distinguait par une grande variété des modèles et une production soutenue grâce à l’invention, en 1888, d’un système ingénieux d’assemblage de la tôle par agrafes (brevet C.R.).  Parmi les enseignes françaises, on connaît également les modèles d’Henri Avoiron, de Simon & Rivollet (S.R.) qui utilisaient beaucoup le plomb et l’étain, d’Autajon & Roustant, de Martinan & Larnaude, de Carion & Petit, de Saint Mihiel jeune, des Frères Richard, du français IJF.

Jusqu’aux années 1950, les fabricants français collaborèrent et échangèrent leurs pièces et outillages afin de lutter contre la concurrence allemande.   Car, en effet, c’est surtout en Allemagne qu’on trouvait la plus importante production de penny toys et la plus qualitative aussi. Leurs jouets de bazar étaient très bien finis et souvent beaucoup mieux décorés que les modèles émanant des productions françaises. Pour la plupart, ils étaient fabriqués à Nuremberg ou dans la région (Sonneberg) qui concentrait un grand nombre de manufactures spécialisées dans ce secteur. Les penny toys étaient exportés ensuite en grande quantité dans le monde entier. 

Les marques Bing, Fleischmann se sont lancées très tôt dans l’aventure des jouets de bazar.

Meier, roi du penny toy.



Le grand nom du « penny toy » allemand reste, sans conteste, la firme Meier créée en 1879 à Nuremberg. La variété de la production et la qualité de la décoration étaient les points forts de la marque. On peut citer l’exemple du petit coq picorant des grains qui fut l’un des succès de la société mais il y eut beaucoup d’autres modèles animés. Parmi les fabricants allemands les plus prolifiques, on dénombre Johann Distler, Georg Fischer, une autre firme implantée à Nuremberg en 1903, Issmayer qui produisit des jouets bon marché dès 1861, Gely (Georg Levy) qui commercialisa de superbes petites motocyclettes, Einfalt (qui deviendra plus tard Technofix), Hess, Kellermann (CKO), Kellenberg… 

Certains penny toys étaient regroupés avec des décors le plus souvent en carton, dans des boîtes produites par Spear & Shone. Souvent, les logos des fabricants étaient soit imprimés en même temps que la décoration soit embossés sur les feuilles de fer-blanc, accompagnés des mots « ges. Gesch », ce qui signifiait que le jouet était breveté en Allemagne.  Quelques penny toys ont été fabriqués aux USA, en Angleterre, au Japon, en Italie, en Espagne. Cette dernière a offert un choix très intéressant de jouets de bazar, au travers des sociétés Rico (R.S.A., sud du pays) et surtout Paya. La tradition y continue de nos jours encore au travers de fournisseurs de jouets en tôle tels que « Protocol » qui propose des rééditions d’anciens modèles.

 

 Signification des initiales et acronymes

C.K.O. pour Kellermann

Firme allemande ayant produit des penny toys dès 1910 sous la direction de Georg Kellermann à Nuremberg.

C.R. pour Charles Rossignol (1868-1962).

Fondée en 1868, la marque C.R. est déposée en août 1890 par Charles-Jacques Rossignol. Les amoureux de la marque C.R. sont nombreux. Il faut avouer que la grande maison fondée en 1868 a conçu de beaux objets en tôle emboutie et lithographiée, proposant une considérable gamme de jouets (animaux, avions, autos, trains, bateaux), y compris dans la série des Quat’sous, donc très bon marché et de petite taille.

Einfalt, Allemagne (1922-1938)

   


Papillon et scarabée Einfalt (1922-1930)

Einfalt est une marque fondée par les frères Georg et Johann Einfalt. La marque au papillon a produit les plus beaux penny toys revêtus de peinture à l’alcool, procédé antérieur à l’impression lithographique, qui donne de belles couleurs chatoyantes aux multiples insectes de métal caractéristiques des débuts de la production. La gamme de penny toys et des jouets en tôle doté de mécanismes, certains estampillés des initiales G.E.N., s’étend jusqu’ en 1935, date du changement de la marque en Technofix.

 

GELY pour Georg Levy (Allemagne), 1920-1971

Après s’être associé au fabricant Kienberger jusqu’en 1916, Georg Levy démarra sa propre gamme de jouets en tôle en 1920.  Son jouet le plus célèbre est «  les joueurs de billard », jouet mécanique qu’il utilisa en logotype dès 1925. En 1934, il installe sa compagnie en Angleterre.

G.F. pour Georg Fischer : sigle G.F. ou logo en forme de poisson (1908-1932)

Fabrique de Nuremberg ayant produit de nombreux jouets en tôle à mécanisme, ainsi qu’une gamme conséquente de trains- jouets.

Hess, Allemagne, 1826-1934



L’atelier de Mattheus Hess fait partie des premiers fabricants de jouets en fer-blanc de Nuremberg. Fondée en 1826, Hess est le premier a produite des trains de plancher, sans mécanismes. La lithographie des jouets Hess est poussée dans le détail, la forme des voitures est typique à cette marque, notamment les roues pleines lithographiées, de ce fait facilement identifiable. Par contre, le choix des couleurs proposé est restreint, surtout des rouges ou vert foncé. Hess est surtout populaire auprès des collectionneurs pour la fabrication de belles automobiles à mécanismes des années 1920-30, les « HESSMOBIEL ».

J.D. pour Johann Distler (1900-1962)


 

La production de jouets Distler débute en Allemagne en 1900. De 1900 à 1914, Meier fut le plus gros fabricant de penny toys, avec un catalogue très diversifié et des jouets d’une qualité inégalée.

M pour Meier (Allemagne)


 

Firme fondée par Johann Philip Meier en 1879, à Nuremberg. La marque qui utilise comme image un chien tirant une carriole est déposée en 1894.Quelques jouets étaient seulement marqués du seul « M ». Meier fut l’un des principaux et le plus prolifique des fabricants allemands de penny toys d’avant 1910, et ce jusqu’au décès du fondateur en 1911. La production fut reprise ensuite par Jean Weinberger.

Si on parlait argent ?

 4 sous = 20 centimes 1 pièce d’un penny = l’équivalent d’un centime français

 Un penny toy était donc vendu au prix d’un paquet de bonbons… 

Combien ça coute ?

Les penny toys sont relativement rares aujourd’hui car il est bien sûr difficile de trouver ces objets centenaires en bon état puisque leur faible valeur à l’achat n’incitait pas leur propriétaire à les ménager. Cependant, ils sont très recherchés et collectionnés. Dans les salles de vente, certaines pièces peuvent atteindre des cotes extrêmement élevées.  Une des plus importante vente de Penny Toys a été organisée par la maison CHRISTIES en 2004, il s’agissait de la collection de David Pressland, le plus grand collectionneur de Penny toys au monde et qui y a consacré de nombreux ouvrages.


                                            le livre de référence par David Pressland disponible sur demande

                                             à levillagedujouet@orange.fr