Avions jouets en tôle, les pionniers
Les aéronefs, puis les avions ont témoigné tout au long de leur production d’inventions ingénieuses, curieuses, parfois fantaisistes qui ont donné à l’humanité le pouvoir de voler. Les fabricants de jouets contemporains des débuts de l’aéronautique n’ont eux aussi pas manqué d’imagination pour proposer aux enfants une gamme considérable d’aéroplanes et avions inspirés de la réalité.
Les années 1930, l’âge d’or de l’avion-jouet mécanique
Les premiers jouets aéronautiques d’avant 1914 sont fabriqués en faible quantité dans des matières fragiles : fils de fer, cartons, osier, papier. Ces « aéroplanes », puisque c’est leur appellation avant 1914, s’apparentent plus à des maquettes des inventions des « plus légers que l’air » à vocation didactique. Il s’agit souvent de manèges à jouets où des aéroplanes, zeppelins ou ballons dirigeables sont animés par des faisceaux d’élastiques tordus et tournent autour d’un pylône. L’essor du jouet aéronautique n’interviendra qu’au moment des exploits du pilote Louis Blériot au-dessus de la Manche en juillet 1909, performance qui a donné naissance à de nombreux jouets en France, notamment chez Charles Rossignol, et en Allemagne chez Distler par exemple.
L’avion-jouet prend le dessus sur les dirigeables comme en proposait MARKLIN à partir de 1910. Les meetings d’aviations sont organisés et l’énorme popularité des pilotes donnent naissance à des jouets en fer-blanc produits en quantité.
Les allemands Tipp &co, Distler, Günthermann sont les plus féconds
La France qui a été pionnière du jouet aéronautique avant 1914, perd sa position après la première guerre mondiale. Les fabricants d’Allemagne et du Japon sont alors les plus présents sur le marché et ils inventent des jouets en tôle dont la lithographie est soignée et les mécanismes robustes. Tipp & Co en Allemagne est le principal acteur jusqu’en 1935, en développant une gamme importante d’avions-jouets, dont certains modèles sont lithographiés aux couleurs des pays où ils sont destinés. Après le départ forcé du patron de Tipp & Co Philip Ullmann en 1933 vers l’Angleterre où il fondera la firme de jouets Mettoy, les avions-jouets se perfectionnent chez Tipp & Co, les modèles sont plus proches des originaux volants et la décoration de la tôle est détaillée : capots, ailes, tuyaux d’échappement et dérives finement dessinés, moteurs, rivets et ouïes présents. Souvent ils reprennent sur le marquage des ailes l’immatriculation des vrais avions et n’oublient pat de placer deux pilotes dans l’avion comme pour l’exploit réalisé par Costes et Bellonte, jouet de Günthermann.
Les jouets témoignent
des grandes traversées, raids et records
Le Spirit of St Louis de Charles Lindbergh
C’est en mai 1927 que l’aviateur Charles Lindbergh fit en
solo le premier vol de New-York à Paris aux commandes de son monoplan construit
en Californie avec le soutien financier de la Ville de Saint-Louis. Cet exploit
fut commémoré par les fabricants qui ont rivalisé d’imagination pour inclure
dans leurs catalogues des jouets et jeux d’avions à sa gloire. En particulier
l’allemand Bing fut le plus inventif avec une gamme de manèges aériens. Le
français JML donna naissance à un adorable petit avion mécanique :
« New-York-Paris ». Les américains Ferdinand Strauss et Girard ont
également proposé leurs versions de l’évènement.
Les hydravions géants
donnent naissance à d’impressionnants jouets
1910 est l’année du premier vol autonome d’un hydravion et
les fabricants de jouets allemands comme Ernst Plank incluent dans leur gamme
dès 1912 des hydravions-jouets en tôle peinte qui peuvent se mouvoir sur l’eau
l’aide d’un mécanisme qui anime une hélice frontale, production interrompue par
le premier conflit mondial de 1914. L’âge d’or de « l’avion qui
flotte » se situe dans les années 1930 et il est dominé par les ateliers
allemands. Il s’agit souvent pour ces fabricants comme Distler ou Günthermann d’aménager
des modèles présents dans leurs catalogues en les équipant de flotteurs en
tôle, les attaches de suspension du jouet étant souvent conservées. L’italien
INGAP proposera sa version naïve d’hydravions-jouets dès 1933 avec de charmants
modèles dont le capot moteur est décoré de têtes de poissons.
Les avions de l’ingénieur Claude Dornier qui s’illustrent dès
1925 par le vol du pôle Nord de Roald Amunsen inspirent particulièrement les
fabricants de jouets. Günthermann
CKO et l’espagnol Paya en donneront de multiples versions dans les années 1930,
jouets roulants chez Cko (Kelermann) ou flottants chez Günthermann, chez l’américain Chein ou encore
chez le français JEP qui ajoute à son catalogue de 1934 un superbe hydravion
rouge de 48 cm à cocardes tricolore, modèle démarqué de son Dewoitine F 260.
Mais parmi ces industriels de l’hydravion-jouet, c’est Fleischmann déjà
prolifique fabricant de bateaux-jouets qui a la palme (c’est le cas de
dire !). Ses versions successives de l’avion Dornier, Dornier Wal puis
Dornier DO-X de 1930 sont les plus spectaculaires avions-jouets de l’époque. Le
vrai Dornier DO-X transportant 100 passagers
construit pour le service transatlantique était doté de 12 moteurs. Ces modèles
dont les ailes sont pourvues de multiples moteurs à hélice, dont une douzaine
pour les ailes du Dornier DO-X et une grande frontale qui existe sur le jouet
mais pas sur l’original pour le mouvoir sur l’eau, conservent toutefois leurs
attaches métalliques de suspension.
Un magnifique hydravion qui cherche encore son fabricant !
En 1939, le Latécoère 521 aux moteurs Hispano Suiza 900CV,
baptisé « Lieutenant-de-Vaisseau-Paris » assure la liaison Paris-New
York ». Cet avion de fret et de passagers a été décliné sous la forme d’un
magnifique jouet tout en tôle lithographiée de 49 cm d’envergure, proposé dans
les catalogues d’Etrennes de 1935. Malheureusement ce beau modèle ne portant
aucune marque et résultant d’une fabrication industrielle (Marquage de la
litho, pli du métal par des machines) ne peut être le travail isolé d’un
artisan. Le doute subsiste encore de nos jours pour identifier de manière
définitive son fabricant. Il existe plusieurs hypothèses d’attribution selon
les experts : JEP, Rossignol, Joustra, JML (c’est ainsi qu’il est
identifié dans le livre de l’expert Frederic Marchand) ou encore ML (Martinan
& Larnaude) comme indiqué dans le livre de P. Despature : « Mes
Avions Jouets ». L’énigme n’est toujours pas résolue.
Conseils
d’achat
Il est assez facile d’identifier l’origine du jouet quand on
dispose de la bonne documentation, bien que souvent les avions jouets sont
mélangés anonymement aux autres jouets mécaniques dans les catalogues des
grands magasins de l’époque. Veillez tout d’abord à la qualité de la
lithographie, la présence éventuelle de « repeints », l’absence
d’éléments, la présence de rouille. Un mécanisme défectueux est moins
pénalisant car ce type de réparation est facile à effectuer pour un
restaurateur.
Combien ça coûte ?
Il est difficile d’établir une fourchette de prix concernant
ces avions-jouets. Ils passent rarement en salle de vente et ce marché est
confidentiel et le faible nombre ce collectionneur de ce thème ne permet pas
d’établir un marché. La plupart des modèles acquis par les collectionneurs sont
achetés auprès de marchands spécialisés.
COPYRIGHT TEXTE PAKY 2020
Article complet paru dans la revue Collectionneur & Chineur
Merci à Patrick Despature pour sa
disponibilité et son érudition. Copyright : Collection
« Mes-avions-jouets » de P. Despature, photos de Roberto Pellegrini.